La 5è symphonie de Beethoven






Le contexte musical : du classicisme au romantisme



BEETHOVEN : l'homme et l'oeuvre







voir aussi : Beethoven






La 5è Symphonie dite "du Destin"


Symphonie n°5 de Beethoven (Michel Lecompte)
>> Michel Lecompte : Guide illustré de la musique symphonique de Beethoven, Fayard, 1995.


La 5è symphonie de Beethoven
>> Guide de la musique symphonique (Fayard)


Beethoven vu par Berlioz - La symphonie en Ut mineur (wikisource)








Généralités

Titre : Symphonie n°5, en Ut mineur op.67
Compositeur : Ludwig van Beethoven (1770‐1827), allemand
Date de création : 22 décembre 1808, Théâtre de Vienne
Genre : Symphonie en 4 mouvements
Durée : 33 minutes environ (variables selon les interprétations)

La symphonie est construite en 4 mouvements.

La 5e symphonie de Ludwig van Beethoven est certainement, de toutes les œuvres du compositeur, celle qui est la plus connue, la plus jouée, la plus enregistrée.
C’est un monument unique et impressionnant, une œuvre « titanesque ».
Beethoven conçut cette œuvre progressivement (premières ébauches à partir de 1804) et la composa essentiellement en 1807-1808, après beaucoup de recherches et d’essais (pour le seul 1er mouvement il y a eu 14 versions d’ébauches et 3 fins différentes envisagées).
La création eut lieu le 22 décembre 1808 à Vienne, sous la direction du compositeur lui-même, déjà atteint de surdité.

Au programme de ce concert – fleuve de 4 heures figurait :

  • la Symphonie « pastorale »
  • l’aria « ah, perfido »
  • le 4° Concerto pour piano, joué par Beethoven lui-même
  • la Symphonie n°5 en ut mineur
  • la Fantaisie pour piano, chœur et orchestre
  • 3 morceaux de la messe en ut majeur.

Il semble qu’à sa première audition, la 5e symphonie n’ait pas été appréciée à sa juste valeur en raison de la « médiocrité de son interprétation ».
La seconde audition eut lieu à Leipzig le 23 janvier 1809 et fut accueillie avec enthousiasme. Puis, ce fut à Vienne que la 5e symphonie fut rejouée en 1812 et 1813, avec succès. A Paris, elle fut jouée pour la 1ère fois en 1828 et suscita stupeur et admiration. Fétis, dans la Revue musicale, écrivit « une telle création se situe au-dessus de la musique, ce ne sont plus des flûtes, des cors, des violons et des contrebasses que l’on entend, c’est le monde, l’univers qui s’ébranle ».

L'orchestration


  • Le quintette à cordes : 1ers violons, 2è violons, alti, violoncelles, contrebasses
  • bois : 2 flûtes, 2 hautbois, 2 clarinettes, 2 bassons
  • cuivres : 2 cors, 2 trompettes en ut,
  • percussions : 2 timbales




Puis s’adjoint, dans le 4è mouvement : 1 flûte piccolo, 1 contrebasson et 3 trombones.



A noter que dans certaines interprétations d’autrefois, les vents étaient triplés (cors en particulier), et les cordes très opulentes. Actuellement on tend à rendre à l’orchestre ses dimensions originales.


Structure de l'oeuvre

Il faut dire que cette symphonie est la première symphonie "cyclique" de l’histoire car la célèbre cellule rythmique du 1er mouvement se retrouve dans toute la symphonie ce qui lui donne une grande unité.
La tonalité d’Ut mineur, rarement utilisée à l’époque, traduit un sentiment de drame ou de tragédie.
Avant Beethoven, Joseph Haydn fut, apparemment, un des seuls à avoir composé des grandes symphonies en Ut mineur : la 52e en 1772, la 78e en 1782 et la 95e en 1791 (cette dernière faisant partie des fameuses "londoniennes"). Elles sont les ancêtres de la Cinquième, tout en restant très classiques, avec leurs 4 mouvements dont un menuet en 3è position.



Le motif du destin

Cette grande popularité, la Cinquième la doit d'abord à son premier mouvement et à son légendaire motif de quatre notes, trois brèves identiques et une longue, souvent appelé « thème ou motif du destin ».
Ce motif de 4 notes va “irriguer” tout la  symphonie de manière à lui assurer sa cohésion, son unité. C’est une ébauche du procédé cyclique (utilisé souvent à la fin du romantisme).
On connaît l'anecdote rapportée par Schindler : « So pocht das Schicksal an die Pforte » (ainsi le destin frappe à la porte) aurait répondu Beethoven à Schindler qui le questionnait sur la signification des quatre notes fatidiques de ce motif.
Le thème du destin qui est une idée foncièrement beethovénienne.
La B.B.C. a contribué à sa manière à populariser cette oeuvre, en utilisant pendant la seconde guerre mondiale les quatre notes de la cellule rythmique initiale, frappées par les timbales, comme indicatif de ses émissions à l'intention des pays européens qui étaient alors sous le joug nazi. Indicatif doublement symbolique car symbole de lutte et d'énergie à l'image de cette Symphonie, en même temps que symbole du V de Victoire, trois brèves suivies d'une longue correspondant à la lettre V dans l'alphabet morse.



1er MOUVEMENT

Allegro con brio en Ut mineur – 502 mesures (+ reprise de l’exposition)

« Il n’existe rien de plus simple que le motif que le maître donne pour base à tout l’allegro, et on remarque surtout avec étonnement comment il a su disposer tous les motifs secondaires, tous les épisodes, grâce à leur rapport rythmique, de façon qu’ils ne servent qu’à relever de plus en plus le caractère de tout le morceau, que ce thème ne faisait qu’indiquer. Toutes les phrases sont courtes, consistant seulement en deux ou trois mesures, et sont partagées dans une opposition constante des instruments à cordes et des instruments à vents. On pourrait croire que de semblables éléments ne sauraient produire qu’une chose morcelée, incompréhensible : mais c’est au contraire cet arrangement de l’ensemble, aussi bien que cette continuelle succession de phrases courtes et d’accords isolés, qui porte à son comble le sentiment d’un désir ardent et indicible. D’où suit que, si l’emploi du contrepoint témoigne d’une étude profonde de l’art, de même aussi les incidentes, les allusions perpétuelles au thème principal, prouvent combien le maître a non seulement embrassé l’ensemble en esprit, avec toutes ces indications caractéristiques, mais comme il l’a pénétré à fond. »
E.T.A. Hoffmann, Allgemeine musikalische Zeitung avril-mai 1810

On doit rappeler ici la fameuse anecdote selon laquelle, à une question posée par Schindler au sujet de la signification des 4 notes d’ouverture, Beethoven aurait répondu : « ainsi le Destin frappe à la porte ».
Ce mouvement est plein d’une énergie extraordinaire, il est tragique et violent.
Il est de forme sonate, et est essentiellement construit sur le fameux motif de 4 notes, attaqué « ex abrupto » fortissimo (thème A “du destin”).
Ce motif est ensuite repris et répété par les cordes en dialogue, puis joué par le tutti, jusqu’à un appel de cor fortissimo (transition) devançant l’énoncé du second thème, très lyrique (thème B)
Ce 1er mouvement défie toute analyse, mais est d’un équilibre admirable :
-124 mesures pour l’exposition, avec reprise obligatoire ;
-123 mesures pour le développement construit entièrement sur le fameux motif de 4 notes car le second thème n’intervient pas ;
-126 pour la réexposition (à noter au début de la réexposition une accalmie soudaine, notée « adagio », sorte d’imploration, courte cadence jouée par le hautbois) ;
-129 pour la coda.
André Jolivet affirmait que ce premier mouvement constitue « une des plus incontestables réussites de la musique de tous les temps ».





















2è MOUVEMENT

Andante con moto / en la bémol majeur (247 mesures)

« Dans l’andante reparaît le génie formidable qui a saisi, angoissé notre âme dans l’allegro, menaçant à chaque instant du milieu d’un nuage orageux dans lequel il s’est caché, et devant ses éclairs, les formes aimables qui nous environnaient et nous consolaient s’enfuient rapidement. »
E.T.A. Hoffmann, Allgemeine musikalische Zeitung avril-mai 1810

Ce mouvement se rapproche de la forme thème et variations. Il est plein de contrastes, avec alternance de passages doux et de passages violents. Il débute par un thème lyrique d’une grande sérénité, aux alti et violoncelles (thème A).
Mais très vite apparaissent des passages aux accents véritablement guerriers.
Les 1ères et 2e variations sur le thème sont jouées par les alti associés aux violoncelles, auxquels répondent, la 2e fois, les 1ers violons pianissimo. Ailleurs, à maintes reprises, le tutti répond fortissimo, jusqu’à l’affirmation des derniers accords.























3è MOUVEMENT

Allegro / en Ut mineur (373 mesures)

« Le menuet qui succède à l’andante est aussi original, aussi prenant sur l’esprit de l’auditeur qu’on pouvait l’attendre du maître, dans la composition de cette partie de la symphonie qui, dans la forme de Haydn qu’il a choisie, doit être la plus piquante et la plus spirituelle de toutes. Ce sont surtout ces modulations originales, ces résolutions sur l’accord de dominante majeure, attaqué par la basse comme la tonique du thème suivant, c’est aussi le thème, développé seulement quelques mesures, qui caractérisent si vivement la musique de Beethoven, et ces inquiétudes, ces pressentiments d’un empire idéal, où les phrases de l’allegro bouleversent l’esprit de l’auditeur, vous saisissent de nouveau. »
E.T.A. Hoffmann, Allgemeine musikalische Zeitung avril-mai 1810


Ce morceau rapide, contrairement à ce qui a été très souvent écrit, n’est pas un scherzo et il ne contient aucun trio véritable. Il suffit d’ailleurs de consulter la partition pour s’apercevoir qu’il n’y a aucune indication de « scherzo », ni de « trio » de la main du compositeur.
En réalité ce 3e mouvement est très singulier : il ne joue pas le rôle de scherzo mais celui de prologue au 4e mouvement auquel il est relié par une habile et subtile transition (passage de l’ut mineur à l’ut majeur). De forme tripartite, il peut être schématisé ainsi : A - B (b1+b1 - b2) - C.

– Le début du morceau, mystérieux, se fait pianissimo aux basses (thème des violoncelles). Surviennent aussitôt de vigoureux appels de CORS, fortissimo, clamant les 4 notes du 1° mouvement (thème du destin), en une sorte de marche.

B – Quant à la partie médiane de ce mouvement, en majeur, elle est constituée de 2 parties :
- 1er fugato : b1 : « l’effroyable course des contrebasses » selon Ludwig Spohr, avec reprise immédiate. (b1+b1)
- suit b2, débutant par un second fugato suivi d’un rappel écourté de A.

C – la 3e partie débute piano avec un rappel du début du mouvement.
Soudain survient un pianissimo, pendant lequel les bassons jouent à découvert. Puis c’est la timbale qui imprime une pulsation obsédante, sur laquelle s’effectuent des modulations assurant le passage du mineur au majeur. Finalement un crescendo saisissant, sur les 8 dernières mesures, aboutit à l’explosion du thème du 4e mouvement.










(jusque 7'40'')

(jusque 7'40'')













4è MOUVEMENT

Allegro / en ut majeur  444 mesures (+ reprise de l’exposition)

« Mais semblable à la lumière éclatante, éblouissante, du soleil perçant soudain la nuit profonde, le thème pompeux et triomphal du morceau final en ut majeur empli tout l’orchestre, auquel se joignent maintenant les petites flûtes, le trombone et le contrebasson. Les phrases de cet allegro sont plus larges que les précédentes ; et moins remarquables par la mélodie que par les imitations contrapuntiques et par leur force ; les modulations ne sont ni raffinées, ni incompréhensibles ; la première partie surtout a presque l’envolée vigoureuse de l’ouverture. »
E.T.A. Hoffmann, Allgemeine musikalische Zeitung avril-mai 1810

Dans ce mouvement apparaissent une flûte piccolo, un contrebasson et 3 trombones, innovation à l’époque. Ce sont des fanfares éclatantes, exprimant la joie de la victoire, dans un Ut majeur jubilatoire. Ce mouvement, à lui seul est, véritablement, une « Symphonie de Victoire », préfigurant celle qu’écrira Beethoven à la fin de la « Bataille de Vittoria » en 1813, laquelle sera toutefois de moindre envergure. Ici, la victoire est encore plus triomphale, victoire d’un super héros sur le destin ».
Ce mouvement déploie une énergie inouïe et semble souvent clamer le mot "Liberté". Remarquons que presque tout le mouvement est joué fortissimo ou forte.

A/ Dès le début de l’exposition, l’orchestre complet attaque donc le fameux thème A
Il est suivi de plusieurs éléments thématiques, en particulier par un passage des cors, jouant à découvert et fortissimo. Cette exposition comporte une barre de reprise. Cette reprise, autrefois souvent négligée est de nos jours souvent effectuée, ce qui rend à ce 4e mouvement sa vraie stature.

B/ Le développement se fait sur les différents éléments thématiques, de façon magistrale.
Après un des rares passages piano, joué par tous les bois, les cordes interviennent forte, puis les trombones surgissent fortissimo, à découvert, avec un effet saisissant. Soudain, de façon inattendue, apparaît un passage « piano subito » qui est un rappel du 3e mouvement (noté : tempo primo, ce qui indique bien que les 3e et le 4e mouvements forment un ensemble). Il se termine par un crescendo sur 3 mesures, menant à la réexposition.

C/ La réexposition reprend les éléments de l’exposition.
Elle mène à un passage piano, de courte durée, à la fois crescendo et accelerando, aboutissant au presto final (coda). Et, c’est en véritable apothéose que se termine la symphonie, avec, à la fin une succession de 8 accords fortissimo, traduisant la farouche détermination du compositeur.










à partir de 7'40''

à partir de 7'40''










L'oeuvre et ses prolongements










Ressources


Symphonie nº 5 (Beethoven) - Wikiwand

Eduthèque - Symphonie n° 5 de Ludwig Van Beethoven
Eduthèque - La boîte à outils : La révolution Beethoven

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