Ravel - Concerto pour la main gauche (Olivier Herbay)



Cette œuvre écrite en pleine montée du nazisme, commande d'un concertiste manchot, symbolise à mes yeux une allégorie de la guerre. Un homme seul se dresse contre l'envahisseur représenté par l'orchestre. Il s'agit là d'un combat titanesque ou le pianiste finira dévoré par la masse orchestrale.
Mais au-delà d'une simple référence historique, cette pièce me semble indissociable de l'autre œuvre concertante de Ravel qu'est le concerto en Sol.
Écrits à la même période, ces deux chefs-d'œuvre sont totalement opposés, tant par l'esprit que par leurs structures.
Dans le concerto pour la main gauche Ravel exprime la haine et l'obscurité, alors que le concerto en sol est plein d'amour et de lumière.
Dans la première œuvre nous percevons une couleur sonore sombre incarné par la tonalité de Ré, que BACH a lui-même utilisé pour écrire l'une de ses pièces les plus bouleversante, la « Chaconne ».
Pour son deuxième concerto le compositeur a choisi Sol majeur, tonalité « Solaire » par excellence.
Pour autant, malgré leur opposition, je pense que ces deux concertos fusionnent, se combinant en une vision apocalyptique du monde au sens ésotérique du mot. Le bien et le mal s'y côtoient pour manifester un univers qui par essence n'est ni bien ni mal, ni bon ni mauvais , il est !
Cette vision du monde a travers l'œuvre, était-ce là l'idée de RAVEL ?
Nous le savons tous, ce génie musical préférait le concerto en Sol, qui pourrait préférer les ténèbres à la lumière ?

Olivier Herbay, pianiste