Music of Tibet (The Deben Bhattacharya Collection)



Music of Tibet - FA5069
THE DEBEN BHATTACHARYA COLLECTION

Au cours de l’année 1975, Deben Bhattacharya s’est rendu au Sikkim. C’était une époque troublée sur le plan politique puisque le Sikkim était en train d’être rattaché à l’Inde. Cependant, la communauté indienne semblait peu affectée par ces troubles. A Gangtok, les écoliers chantaient et dansaient volontiers pour Deben Bhattacharya qui enregistrait avec son Nagra. Deben Bhattacharya a également visité le monastère de Rumtek et a eu le privilège de rencontrer le Karmapa, ou chef spirituel. Les jeunes lamas vêtus de robes rouges couraient dans le mo­nastère avec des sourires espiègles. Ils se préparaient à devenir moines mais n’avaient pas perdu l’esprit joueur des jeunes garçons. Son expérience fut semblable lorsqu’il se rendit dans d’autres régions de l’Himalaya pour enregistrer et réaliser deux documentaires. A Dha­ramshala, les jeunes lamas jouaient en se suspendant aux branches des arbres ce qui les amusait beaucoup.
Ces tibétains ont toujours vécu en Inde, en préservant leur mode de vie et leur pratiques religieuses. Pourtant, quand les Chinois envahirent le Tibet en 1959 et occupèrent le pays sans rencontrer aucune résistance, environ 100 000 tibétains s’enfuirent pour suivre leur chef spirituel, le Dalaï-lama, en Inde. Ils y furent accueillis comme les habitants d’un pays voisin et ami. Avant 1959, il y avait plus de 3000 grands monastères et 200 000 moines au Tibet, mais la plupart de ces monastères furent détruits à la suite de l’occupation chinoise. Aujourd’hui, les réfugiés tibétains en Inde ont établi une centaine de monastères. La musique présentée sur ce CD a été enregistrée dans des temples et des monastères tibétains en Inde, construits avant et après l’occupation chinoise du Tibet.
Il y a également sur ce CD, en plus de la musique sacrée, des enregistrements de musique populaire réalisés dans des écoles du Sikkim en 1975.
Pendant ses voyages de 1979, Deben Bhattacharya a réalisé deux films : “Le chant du Lama” et “Echos du Tibet” qui font partie d’une série de 22 films intitulée “Aspects de l’Asie”.

La musique traditionnelle tibétaine, qu’elle soit sacrée ou profane, joue un rôle précis dans la vie quotidienne. Elle a permis aux Tibétains de lutter contre le désespoir et les a aidés à préserver leur dignité et leur respect d’eux-mêmes. Au cours de la première moitié du septième siècle, le roi tibétain Song-Tsen-Gampo fit de grands efforts pour favoriser l’introduction et l’installation du bouddhisme indien au Tibet. Il envoya en Inde des spécialistes étudier l’approche indienne de la vie spirituelle et de la vie matérielle. De célèbres savants bouddhistes furent invités au Tibet, entre les 7e et 13e siècles, comme hôtes des rois tibétains qui tentaient d’infléchir le pouvoir des anciens prêtres Böns, issus du chamanisme. Ces derniers exerçaient une grande influence sur la population en exploitant leur peur du surnaturel. Malgré l’épanouissement du bouddhisme au Tibet, la religion Bön ne disparu pas complètement. Les deux religions se mélangèrent tout en conser­vant chacune une identité distincte. Les évolutions des différentes sectes lamas illustrent cette période historique intéressante durant laquelle le Boud­dhisme et le Bön vécurent côte à côte.

L’alphabet tibétain d’aujourd’hui, les arts religieux et l’architecture furent introduits au Tibet durant cette période: cette culture a continué de s’épanouir pendant plusieurs siècles. Cette longue période d’échanges continus entre le Tibet et l’Inde, qui dura pendant treize siècles d’affilés, ne semble marquée par aucune discorde ou conflit entre les deux pays. Aujourd’hui, les Tibétains sont considérés comme les autres Indiens et font partie d’une population qui compte un million de personnes.

La musique sacrée tibétaine

Comme au Tibet, la musique des monastères et des temples construits en Inde consiste en récitations et chants de textes religieux et enseignements des grands maîtres du passé. Des citations de ces enseignements sont inscrites sur des banderoles et des roues de prières, que l’on trouve près des temples et des maisons. Les bouddhistes ne prient pas pour obtenir des bienfaits matériels. Les chants représentent les enseignements de Bouddha et leur interprétation par des savants et des adeptes vénérés. Ils constituent ainsi un vaste ensemble de littérature théologique et ont contribué à l’évolution d’un grand nombre de sectes au Tibet, chacune suivant un chemin spécifique tracé par un enseignant particulier. L’entraînement à la récitation commence à un jeune âge. La discipline monastique stricte encourage les jeunes novices à apprendre les textes religieux et les enseignements par cœur.
Le Bouddhisme est une religion de congrégation et la musique des temples est austère et basée sur la récitation. Le ser­vice au temple commence par la récitation du «trisharanam», les trois maisons ou points centraux du Bouddhisme, qui disent :
«Buddham sharanam gacchami,
dhammam sharanam gacchami,
sangham sharanam gacchami»
«Je cherche refuge en Bouddha
Je cherche refuge en dhamma    
(la foi)
Je cherche refuge en sangha (l’union des moines).»

Le chant et la récitation des textes sacrés sont ponctués périodiquement par des interludes instrumentaux joués sur des instruments à vents et des percussions qui résonnent.
La musique populaire tibétaine
Les chansons et les danses présentes sur ce CD ont été enregistrées en 1975 à l’école Enchey de Gangtok, au Sikkim. Des garçons et des filles chantaient et dansaient joyeusement pour Deben Bhattacharya qui enregistrait. Les changements politiques et les événements locaux ne semblaient pas affecter les écoliers. Leur chants et leurs danses reflètent leur amour de leur pays et de ses traditions.

Les instruments

Les temples de l’Himalaya indien sont exactement les mêmes que ceux du Tibet, le Tibet étant un pays de montagnes, la population emploie des instruments à réverbération pour la musique de temple. Ils se peut que ces derniers trouvent leur origine dans le chamanisme. Les instruments ne sont pas utilisés pour accompagner les voix, mais comme ponctuation, comme pour accorder un repos à la voix et un temps de méditation sur les mots sacrés. Il y a aussi un autre aspect à ces instruments: tandis que la voix chante les textes sacrés, les instruments s’en font l’écho pour que le monde entier puisse les entendre.
Les instruments joués dans le temple et lors des cérémonies monastiques sont les suivants :

Dung-chen: trompe conique du Tibet, généralement en cuivre rouge et décorée d’argent. Le tube conique du Dung-chen varie en longueur, entre un mètre et demi et deux mètres. Pour être joué, il doit être posé à terre ou sur un support. Certains des Dung-chen utilisés par les Tibétains en Inde ont une forme semblable à un télescope ce qui les rend plus faciles à transporter. C’est un excellent instrument à écho.

Gyaling: instrument en roseau à double hampe qui ressemble au Shehnai indien. Le Gyaling est utilisé dans la musique des temples pour apporter un phrasé mélo­dique pendant les interludes ins­tru­mentaux.

Rkan-dun: fabriqué à partir d’os humains (le fémur), le pipeau Rkan-dun est joué par certaines sectes telles que les Drugpa-ka-gyu pendant leurs cérémonies du temple.

Nga: tambour biface, en forme de roue, le Nga est joué avec un bâtonnet incurvé en bois. Bien que les deux faces soient couvertes de peau de yak, une seule peut être frappée à la fois. Il est parfois joué avec deux bâtonnets, l’un frappé sur le corps en bois, l’autre sur la peau tendue.

Daru: semblable au Damaru indien, le tambour Daru a une forme de sablier et est joué avec une paire de cordes attachées à sa taille étroite.

Rolmo: paire de grandes cymbales de bronze.

Singyen: paire de cymbales accrochées au doigt, en bronze.

Tilpo: cloche jouée à la main, en bronze ou en cuivre.

Lingbu: flûte de bambou transversale à six trous.

Arga: clochette accrochée à la cheville.

Tingsha: petite cymbale frappée avec un bâtonnet à tête métallique.

Les danses et les chansons populaires tibétaines sont accompagnées de certains de ces instruments.

LES TITRES


1/ Jensey.
Cérémonie du feu exécutée par Gelugpa (la Secte jaune) en mémoire des morts et conduite par le grand Lama de Kalimpong (Himalaya oriental). Des offrandes de riz, de graines, de beurre cuit, d’une herbe spécifique et de morceaux de papier sur lesquels étaient inscrits le nom des morts étaient dispersés au dessus d’un autel où brûlaient de hautes flammes. Pendant la cérémonie, une procession funéraire s’approcha du grand Lama pour recevoir sa bénédiction avant la crémation. Les chant consistent principalement en la récitation des noms des disparus. Les interludes instrumentaux sont joués sur un Gyaling, un Nga, un Rolmo et un Tilpo.
La cérémonie fût enregistrée au monastère de Ghoom en 1979, au Darjeeling, Himalaya oriental.

2/ Lecture des textes sacrés par les lamas du principal monastère tibétain de Dharamshala, siège du Dalaï lama en Inde.
Reprise alternativement par différents moines, cette lecture est ininterrompue vingt-quatre heures durant et se poursuit ainsi pendant plusieurs mois. Il s’agit d’un événement annuel.
Enregistré à Dharamshala, en Octobre 1979.

3/ Trois moines en prière à Sarnath.
Cérémonie du matin en louange à Bouddha et à ses idéaux, au temple de la secte de Mahayana à Sarnath. C’est à Sarnath que Bouddha a fait son premier sermon, il y a 2500 ans. Plusieurs sectes bouddhistes du monde entier y ont construit des temples et des sanctuaires en témoignage de leur vénération pour Bouddha.
Enregistré dans un temple à Sarnath, en 1979.

4/ Cérémonie du temple de la secte Drugpa-ka-gyu.
Cette célébration annuelle du 10e jour du mois lunaire est la commémoration de la naissance du moine indien Padma­sambhava. Invité par le dirigeant du Tibet, son séjour marque l’introduction du bouddhisme dans le pays. Cet anniversaire célébré par la secte Drugpa-ka-gyu fut introduit en Inde depuis le Tibet Oriental. La récitation des mots sacrés est ponctuée de moments de musique instrumentale, jouée sur des Dung-chen, deux Rkan-duns, un Gyaling, un Nga et un Rolmo.
Enregistré en Octobre 1979 au temple Drugpa-ka-gyu, à Tashijong, Himalya central.

5/ Tucho Dawe Duchi.
Prière de l’après-midi au monastère de Rumtek.
Bien que ces textes puissent être récités à n’importe quelle heure du jour ou de la nuit, cet enregistrement représente la prière de l’après-midi qui se tient au temple du monastère de la Secte du Chapeau Rouge à Rumtek. Les lamas tibétains de la secte du Chapeau Rouge qui vivent dans ce monastère sont entretenus par le roi de Bhutan. La récitation est ponctuée par une musique jouée sur les instruments suivants: une paire de Gyaling, un Nga, un Daru, le Singyen et un Tilpo. Ceci n’est qu’un court extrait d’une cérémonie qui dure presque deux heures.
Enregistré en Avril 1975 à Rumtek, Sikkim, Himalaya oriental.

6/ Ema Linchey.
Danse tibétaine exécutée par 6 filles et 6 garçons. Il s’agit d’une danse populaire religieuse accompagnée par 3 Lingbu (flûte transversale à six trous).
Enregistré à l’école Enchey, à Gangtok, Sikkim, le 6 Avril 1975.

7/ Danse populaire Khampa.
Traditionnellement exécutée par les Tibétains qui vivent dans le district de Khamp. 6 filles et 6 garçons dansent, tandis que 7 filles et 1 garçon de l’école Enchey les accompagnent avec une chanson intitulée “Utta utta Lhasa Ling Lautta”. Le thème de la chanson est la louange du merveilleux paysage de Lhasa. Les instruments sont les suivants : une paire de cymbales (Rolmo), une clochette de cheville (Arga) et une cymbale frappée avec une bâtonnent à tête de métal (Tingsha).
Enregistré à l’école Enchey, Gangtok, Sikkim, en Avril 1975.

8/ Chant patriotique Khampa.
Chant tibétain exprimant des voeux de bonheur pour le pays.
Enregistré à l’école Enchey, Gangtok, Sikkim, en Avril 1975.

9/ Chanson Khampa Tashi
Chantée à la fin du programme, cette chanson apporte sa bénédiction à tous.
Enregistrée à l’école Enchey, Gangtok, Sikkim, en Avril 1975.

10/ Les conques résonnent.
Deux jeunes moines soufflent dans les coquillages à Dharamshala.
Enregistré à Dharamshala en 1979.