Ukraine - Musiques traditionnelles



LA MUSIQUE TRADITIONNELLE UKRAINIENNE

Introduction

Le chant populaire traditionnel est profondément ancré dans la vie et dans l'âme du peuple ukrainien. Comme l'a dit un auteur, il est la biographie poétique d'une nation aussi dure à la tâche qu'au combat, biographie qui dépeint d'une façon mémorable la vie de tout un peuple. Les chansons ukrainiennes sont une chronique vivante qui reflète l'expérience sociale, morale et esthétique du peuple et sa vision du monde ; elles expriment l'essence même de son caractère et jusqu'aux nuances les plus subtiles des sentiments humains. Chaque époque, chaque génération a apporté sa part au trésor d'une culture musicale qui n'a cessé de s'enrichir jusqu'à nos jours.

L'histoire

La culture musicale ukrainienne a son origine dans la musique des anciens Slaves. Des vestiges archéologiques remontant au paléolithique supérieur découverts sur le territoire de l'Ukraine moderne et comprenant des flûtes, des instruments à percussion et d'autres instruments attestent l'existence dans la région d'une tradition musicale fort ancienne.
Du IVè au VIIè siècle, le cours moyen du Dniepr est occupé par l'alliance de tribus qu'on appelle les Antes, aux VIIIè et IXè siècles, des tribus slaves (Poljanes, Severjanes, Drevljanes, Doulèbes (Volhyniens), Oulitchi et Tivertsi vivent dans ce qui est aujourd'hui l'Ukraine. L'apogée du premier État ayant uni les tribus slaves de l'Est — la Rous kiévienne avec Kiev pour centre — se situe à la fin du Xè et au début du XIè siècle. La culture de la Rous kiévienne — architecture, langue écrite et musique — est aussi développée qu'originale. Des images représentant des musiciens jouant d'instruments à vent et d'instruments ressemblant à des luths, de la harpe, de l'orgue ou du cymbalum, de même que les bouffons dansants représentés sur les fresques de la cathédrale Sainte-Sophie de Kiev (XIè siècle) témoignent du grand rôle que la culture musicale populaire jouait dans la vie de la population. L'ancienne « Rous » est le berceau d'où sortiront par la suite trois peuples slaves de l'Est: les Russes, les Ukrainiens et les Biélorusses.

Les régions

La République socialiste d'Ukraine, qui s'étend sur quelque 600 000 km2 et compte plus de 50 millions d'habitants, est d'une grande diversité naturelle. Au nord de vastes forêts, à l'ouest les pittoresques montagnes et vallées des Carpates, dans le centre et dans le sud les fameuses steppes à la riche terre noire. Le principal fleuve de l'Ukraine, le Dniepr (Dnipro en ukrainien), le troisième d'Europe, après la Volga et le Danube, traverse tout le milieu du pays, dessinant une ligne de partage naturelle entre les régions orientales et les régions occidentales de l'Ukraine qui ont des styles de folklore musical différents.
La culture de certaines tribus slaves de l'ouest venues s'établir au cours du premier millénaire sur le territoire de la future Ukraine, les différences qui ont marqué l'évolution historique sur la rive gauche et sur la rive droite du Dniepr et l’interaction avec des groupes ethniques slaves et non slaves sur toute la frontière de l'Ukraine ont été autant d'influences qui expliquent les spécificités régionales du folklore ukrainien.
Aujourd'hui, le genre qui prédomine dans le centre et dans l'est du pays ainsi que dans la steppe est un chant choral qui fait surtout appel au registre grave des voix féminines. C'est là qu'ont fleuri les chansons lyriques.
Au nord, le territoire situé à la frontière entre l'Ukraine et la Biélorussie est appelé Polessyeou "région boisée". Les anciens chants rituels pour les fêtes, hétérophoniques dans un registre étroit, avec des variations et où les voix dans le chant choral s'écartent de temps à autre de l'unisson, sont répandus dans cette région (plages 3, 4, 15).
A l'est et au nord-est, dans la zone ethnographique de la Slobojanchtchina, le vocabulaire des chansons s'est modifié sous l'influence des populations russes et ukrainiennes voisines. Dans cette région prédomine le chant syllabique avec des strophes longues et au style traînant (plage 26).
Dans l'ouest du pays (les Carpates), l'influence des folklores polonais, tchèque, slovaque et hongrois se manifeste par une stabilisation de la métrique, qui contraste avec la mesure asymétrique propre aux chansons d'Ukraine orientale, et par une base harmonique très prononcée dans les chansons lyriques.
Dans le sud-ouest des Carpates (Bucovine), on observe des ressemblances avec la musique instrumentale moldave et roumaine.

Les genres

Le chant traditionnel ukrainien comporte de nombreux genres différents. Ceux-ci relèvent de deux catégories principales: les chants rituels et les chants non rituels. Les premiers, qui sont les plus anciens, comprennent: (1) des incantations, (2) des lamentations, (3) les chants rituels du calendrier populaire, (4) les chansons de mariage.

Dans le groupe (3) ci-dessus, on trouve les chansons :
— du cycle de l'hiver (Noël) : chtchedrivki et koliadkr.
— du cycle du printemps: vesnianki et haïvki ;
— de la fête des épis, faisant appel à la mythologie populaire des rousalki et des mavki ;
— de la période précédant la moisson, célébrant Ivan Koupalo (koupatski), c'est-à-dire saint Jean-Baptiste et saint Pierre (petrivki) ;
— de la moisson : chants rituels de travail marquant le début de la moisson (zajynki) et célébrant l'achèvement de celle-ci (objynki).

Le groupe (4) ci-dessus (chansons de mariage ou vesillia) comprend :
— les chansons, qui décrivent les différents épisodes de la cérémonie nuptiale et dont la fonction est proche de l'incantation ;
— les chansons de mariage non rituelles qu'on chante pour s'amuser à divers stades de la célébration des noces (qui peuvent durer jusqu'à une semaine).

Il existe des chansons de Noël (koliadki) et du Nouvel An (chtchedrivki) que les jeunes, allant de maison en maison, chantent pour souhaiter la prospérité aux propriétaires (plage 2).
Les chansons qui célèbrent le rythme des saisons laissent apparaître des vestiges de croyances païennes. Les images sont anthropomorphiques, par exemple un appel au printemps considéré comme un être vivant. L'appel à la pluie a des résonances magiques. Les rondes chantées et dansées au printemps sont empreintes d’un esprit syncrétiste. Le cri perçant, qui
marque la fin de chaque couplet dans les chansons de printemps, d'été et de mariage chantées dans le nord-est de l'Ukraine (plage 12) est un vestige du style d'interprétation païen.
Au début du printemps (vesna), les vesnianki (qui célèbrent cette saison) se chantent généralement en plein air aux abords du village. Elles doivent donc être chantées à pleine voix, ce qui rend leur intonation approximative et, de ce fait, difficile à transcrire (plages 3, 4, 5). La seconde moitié du printemps donne lieu à des chansons accompagnant les jeux et les rondes (plages 6) qu'on appelle haivki en Ukraine occidentale. Les rondes ukrainiennes sont dansées par un grand nombre de chanteurs qui, d'un pas léger, se déplacent lentement en cercle.
L'été est également bien représenté dans la musique populaire ukrainienne. Le point culminant des fêtes de l'été est la célébration d'Ivan Koupalo (saint Jean- Baptiste), qui marque la fin du cycle des chansons lyriques du printemps consacrées aux amoureux (plage 9). Le rituel de Koupalo ressemble beaucoup par sa signification et son caractère aux petrivki, qu'on chante durant les deux ou trois semaines qui précèdent la fête de saint-Pierre (plage 10).
Le cycle de l’été comprend également les chants de travail des faucheurs et des moissonneurs qui marquent la fin de l’été. Ces chants, qui avaient à l'origine une signification magique, ont fait place ’ par la suite à des thèmes sociaux : le dur labeur des moissonneurs, les relations avec l'employeur ou les revendications salariales. Cependant, la structure tonale i de ces chants garde la marque de leur origine ancienne (plage 11). L'élément festif du rituel, avec la présentation de la couronne d'épis de blé à la fin de la moisson est aujourd'hui encore une pratique courante.

Les chansons de mariage sont chantées dans toute l'Ukraine. Elles correspondent aux différents épisodes qui précèdent la demande en mariage et relèvent de deux catégories principales. La première et la plus importante célèbre l'aspect festif et joyeux du rituel par des chants de félicitations parfois rehaussés de traits comiques (plage 14). Au fil des siècles, ces airs ont pris leur forme mélodique et sont surtout dans le mode majeur. Les chansons de mariage de la seconde catégorie, qu’on chante lorsque la jeune mariée quitte la maison paternelle, sont plus lyriques et plus dramatiques: leur structure est moins rigide et elles sont en mode mineur (plage 15). Les mélodies de mariage typiques de l'ouest de l'Ukraine sont appelées ladkannia. Les noces ukrainiennes sont généralement accompagnées par un | trio musical villageois appelé troïsta musyka, ensemble instrumental populaire très commun en Ukraine dont les principaux instruments sont le violon, le cymbalum (tympanon à marteaux) et le tambour de basque auxquels s'ajoutent souvent un pipeau, une floyara (flûte à bout ouvert) et une basolya (violoncelle utilisé dans la musique populaire).

Les chansons non rituelles sont : les doumy ; les chansons à thème historique ou politique ; les chansons de travail ; les chansons lyriques. Ces dernières peuvent être des chansons d'amour, des chansons évoquant la vie familiale ou des berceuses.
Ce sont les épopées populaires (doumy) qui forment la base de l'art folklorique ukrainien. Elles s'épanouirent avec la naissance de la nation dans une période riche en événements historiques, tant à l'intérieur que sur le plan international. Elles connurent leur plus grand développement du XVè au XVIIè siècle quand le peuple ukrainien luttait contre l'oppression tataro-turque et polonaise.
Les doumy sont de longues compositions lyriques de caractère épique qui reposent sur les principes de la récitation musicale. Dans ces ballades, le rythme des vers, qui ne se limite pas à des formules métriques stables, détermine le style improvisé de la récitation musicale, à base de variations sur des groupes de mots ou des vers typiques. Les phrases dont la longueur varie selon la signification forment des strophes asymétriques que les exécutants appelaient oustoupes (gradins). La force expressive des ballades ou doumy tient à l'originalité des mélodies et 
est renforcée par l'introduction d'exclamations comme «heï» ou «oï».
Les doumy étaient interprétés par un soliste — le kobzar ou Urnik — qui s'accompagnait de la kobza, bandoura ou lira. Les kobzars étaient généralement aveugles et faisaient preuve de grands dons musicaux.
Les thèmes des ballades les plus anciennes sont empruntés à des événements dramatiques de l'histoire nationale, comme l'évasion de trois frères prisonniers des Turcs et la mort du plus jeune d'entre eux. Ce type de ballade rappelle par sa composition les lamentations rituelles. La douma consacrée à Maroussia de Bohouslav (plage 17) en fournit un exemple.
Les kobzars jouaient un rôle important dans la vie sociale et culturelle de l'Ukraine ; ils participèrent directement à la lutte de libération nationale et aux soulèvements contre les seigneurs féodaux et les propriétaires de serfs. Contrairement au folklore d'autres peuples, les ballades et les chansons historiques ukrainiennes ne font pas appel à des thèmes mythologiques ou fantastiques. Elles puisent leur substance au cœur même des événements historiques et de la vie de tous les jours.
Les récits d'événements historiques précis et d'exploits de personnages réels sont caractéristiques des chansons historiques ukrainiennes. Par leurs thèmes empruntés à l'histoire politique de la nation et par leur style poétique et musical, ces chansons sont très proches des doumy dont elles diffèrent seulement par un registre mélodique plus étendu et par une composition plus stable (plage 25). Les chansons historiques des XVIIIè et XIXè siècles donnent une image fidèle de la vie sociale, et la vie quotidienne est évoquée par les chants des serfs et des ouvriers agricoles.
Les chansons ukrainiennes expriment aussi des aspects plus particuliers de la vie sociale. C'est ainsi que les chansons des conducteurs de chars à bœufs (tchoumaks) racontent la vie et les soucis quotidiens des hommes dont le métier, du XVè au XlXè siècle, consistait à transporter du sel entre la Crimée et l'Ukraine. Il existe aussi des chansons de Cosaques, guerriers défendant leur terre natale contre les oppresseurs étrangers. S'inscrivant dans une tradition virile, ces chansons ont un caractère rude et romantique (plage 33).
Les chansons lyriques sont très nombreuses dans le folklore ukrainien. Les chansons d'amour (plages 28, 31 ) et celles qui évoquent le destin des femmes(plage 22, 26) sont aussi poétiques qu'émouvantes. Elles sont parfois déchirantes, exprimant toute la gamme des émotions humaines — amour, joie et chagrin. Elles sont parfois tumultueuses et parfois douces et mélodieuses quand elles célèbrent la beauté de la mère patrie. 

Les instruments traditionnels

La musique instrumentale traditionnelle en Ukraine revêt des formes diverses: soliste, jouant du pipeau, du violon, de la bandoura, etc., et ensembles, comme par exemple le trio musical traditionnel troïsta mouzyka, interprétant surtout des danses et des marches.
La musique n'avait pas toujours pour fonction d'accompagner la danse : les bergers, par exemple, improvisaient au violon ou sur des instruments traditionnels comme la sopilka, la trembita ou la drymba. Il s'agissait alors d'interprétations instrumentales de chansons.
Les instruments de musique traditionnelle les plus populaires en Ukraine sont :
  • les instruments à cordes ou cordophones :
    • à cordes pincées: kobza, bandoura, torban ;
    • à archet : violon, bassolya ;
    • la lira à touches (vielle) ;
    • à cordes frappées : cymbalum (tympanon à marteaux) ;
  • — les instruments à vent ou aérophones : une grande variété de flûtes et de doubles flûtes (sopilka, telenka, floyara, dentsivka) ;
  • les idiophones : drymba (guimbarde), cloches ;
  • les membranophones : tambour grave et tambour de basque.

Conclusion

La musique traditionnelle ukrainienne s'est préservée, jusqu'à nos jours, des chansons les plus anciennes du cycle agricole aux chants de la Grande Guerre patriotique (1941-1945). Aujourd'hui encore, elle ne cesse de se créer et de se développer.
Les chansons sont les compagnes des loisirs et du travail, des joies et des peines. On les chante lors des fêtes familiales et des fêtes civiles, dans la vie de tous les jours comme à l'école. Le folklore ukrainien occupe une large place à la radio et à la télévision qui lui consacrent des programmes spéciaux aux titres évocateurs comme « Sources d'or », « Clarinettes radieuses » ou « Les perles de l'âme populaire ». Des concerts ethnographiques sont régulièrement organisés par l'Union des compositeurs ukrainiens, la Société de musique et le Musée des traditions et de l'architecture populaire. Les maisons d'édition « Mouzytchna Oukraïna » et « Naoukova Doumka » publient des ouvrages consacrés au folklore ukrainien. Fondé en 1936, l'institut d'art, d'histoire du folklore et l'ethnographie fait des recherches dans ce domaine.

L'enregistrement

Le présent enregistrement vise à faire connaître les divers genres qui constituent la musique traditionnelle ukrainienne. Les morceaux ont été choisis dans la plupart des régions qui forment le vaste territoire de la RSS d'Ukraine; ils donnent un aperçu du folklore ukrainien tel qu'il existe de nos jours. 
Les éditeurs tiennent à remercier le Comité d'État pour la radio et la télévision de la RSS d'Ukraine et le Conservatoire de Kiev de l'aide qu'ils ont bien voulu prêter à l'enregistrement.

1. OUVERTURE : TREMBITAS ET ORCHESTRE TRADITIONNEL
Joueurs de trembita et orchestre populaire de la région d'Ivano Frankovsk
Exécuté à l'occasion de la transhumance des moutons vers la «polonina», pacage d'été dans les Carpates. La trembita est utilisé par les Houtsouls et les Boikos dans les régions montagneuses de l'ouest de l'Ukraine pour les grandes fêtes et lors du rassemblement des troupeaux. Elle sert aussi à sonner l'alarme ou à annoncer un décès.

2. « PROMENADE DE PAONS DANS LA MONTAGNE »
Ensemble folklorique du village d'Ivanivka, district de Yarmolyntsi (région de Khmelnitski)
Chant Chtchedrivka — chtchedricki et koliadki sont des chants de louange rituels de l'hiver : ils sont parfois accompagnés d'instruments. Le soir de Noël ou du Nouvel An, les enfants vont de maison en maison pour chanter ces chansons. Les deux types se ressemblent par leur structure de 5 + 5 syllabes.


« VESNIANKA »
Les Vesnianka sont des chansons célébrant avec passion l'arrivée du printemps. Ce genre comprend aussi les chansons qu'interprètent les jeunes pendant les jeux de printemps (haïvki). On remarquera dans les exemples présentés ici l'hétéro- phonie à deux parties, combinaison de variantes mélodiques où les voix s'écartent momentanément de l'unisson. La mélodie est souvent archaïque; le chant, conçu comme un répons, s'achève sur un «parlando».

3. « CHANSON DE PRINTEMPS »
Ensemble folklorique du village de Stari Koni, district de Zaretchnianski (région de Rovno)

4. « CHANSON DE PRINTEMPS »
Ensemble folklorique du village de Vovtchitsi, district de Zaretchnianski (région de Rovno)
Solo : Pelageia Kovtunovitch

5. « OH, SUR LA MONTAGNE »
Ensemble folklorique du village de Krasylivka (région de Jitomir)

6. « LE BERGER »
Ensemble folklorique du village de Stari Koni, district de Zaretchnianski (région de Rovno)

7. POT-POURRI : « VINOTCHOK »
Région d'Ivano-Frankovsk
par J. Pavliouk, V. Hiouk, M. Maximiouk
Suite pour trois sopilkas (instruments utilisés par les bergers). A noter dans la première partie la manière dont l'ensemble, en improvisant, crée un effet de mosaïque. Le mot Vinotchok désigne une petite guirlande ou couronne de fleurs. 

8. « NOUS ALLONS DÉCORER UN ARBUSTE »
par Dominika Tchekoun
Exemple de «chanson des guirlandes», genre ancien qui subsiste encore de nos r jours dans les régions situées à la frontière de la Biélorussie et de l'Ukraine. Ces chansons sont interprétées par des jeunes filles qui vont de maison en maison pendant la fête de la Pentecôte, la guirlande étant le symbole des jeunes filles.

CHANSONS D'ÉTÉ

9. « SUR LA RIVIÈRE PRÈS DU SAULE »
Ensemble folklorique du village d'Ivanivka, district de Yarmohyntsi (région de Khmel- nitski)
Chanson pour voix solo interprétée à l'occasion de la fête de saint Jean-Baptiste (Ivan Koupalo), qui évoque l'image symbolique d'une colombe se baignant dans la rivière. Le thème rythmique est typique; la mélodie est caractéristique de la région de Podolie.

10. « AUJOURD'HUI C'EST LA FÊTE DE SAINT PIERRE »
Ensemble folklorique du village de Lipniki, district de Zouguiny (région de Jitomir)
Cette chanson illustre le thème de la demande en mariage. Le jour de la saint Pierre (29 juin), deux écrevisses — mâle et femelle — étaient habillées comme des humains, parées de rubans et de fleurs et «mariées» au son de chansons nuptiales.

11. « LES MOISSONNEURS »
Ensemble folklorique du village de Kozelets (région de Tchernigov)
Chantée pour la moisson pendant les travaux des champs. On notera le style de cette chanson, transition entre les chansons archaïques du cycle des saisons, avec leur mètre libre et leur mélodie diatonique, et la mélodie lyrique plus développée à structure harmonique.

12. « COUCHER DE SOLEIL »
Chorale du village de Klintsy, district d'Ovroutch (région de Jitomir)
Cette chanson est caractéristique du folklore archaïque. En effet, comme dans d'autres chansons traditionnelles du nord- est de l'Ukraine, chaque strophe s'achève par un cri aigu. On notera le faible ambitus et la tierce neutre; la chanson est à deux voix avec bourdon et récitatif.

13. « LE DÉPART DU BERGER »
Orchestre d’instruments populaires de l’industrie forestière de la région de Transcarpatie.
Tableau musical sur un thème pastoral en forme de rhapsodie, interprété par un ensemble folklorique villageois composé d’instruments traditionnels des Carpates : cymbalum, violon, sopilka, tambour grave, trembita, bassolya, accompagnés de cloches, de claquements de fouet et d’un accordéon. Les improvisations au violon sont suivies de danses au rythme rapide arcan et drobotianka


CHANSONS DE MARIAGE

14. « POUR UNE GUIRLANDE »
Ensemble folklorique du village de Vovtchyk, district de Kozelets (région de T cher- nigov)
Cette chanson évoque une cérémonie de mariage lors de laquelle les participants à la procession nuptiale portent un arbre rituel orné de banderoles et de fleurs artificielles. La chanson nuptiale est interprétée à l'unisson sur un ton perçant, un peu brutal et très expressif; chaque strophe s'achève par un cri aigu typique du nord- est de l'Ukraine.

15. « POURQUOI PLEURER, POURQUOI TE LAMENTER ? »
Ensemble folklorique du village d'Alex- eevka, district de Starosiniaski (région de Khmelnitski)
Chanson rituelle chantée pendant la cérémonie du «dénattage», où l'on défait la tresse de la jeune épousée, qui pleure son enfance passée dans la maison fami¬liale. On notera l'hétérophonie à deux voix avec variations mélodiques.

16. « MÉLODIES NUPTIALES POUR DRYMBA »
Région d'Ivano-Frankovsk par M. Netchai
Drymba est le nom ukrainien de la guimbarde. Ici, l'interprète improvise en combinant plusieurs airs très connus de la région natale.

17. « DOUMA A LA GLOIRE DE MAROUSSIA DE BOHOUSLAV »
F. Jarko : chants et bandoura
C'est l'un des plus vieux thèmes élégiaques exprimant les souffrances des Cosaques capturés par les Turcs.
Cette élégie, qui rappelle la naissance du genre (XVIè-XVIIè siècle), se fonde sur un événement historique: la libération de prisonniers cosaques par Maroussia de Bohouslav, l'épouse ukrainienne d'un dignitaire turc. Elle est interprétée par le kobzar Fedir Jarko, chanteur professionnel qui a étudié l'interprétation traditionnelle de la douma. Il s'accompagne à la bandoura. L'élégie comporte tous les éléments d'une composition aboutie, depuis la plainte introductive jusqu'au «Gloria» final.

18. BERCEUSE « OH, LIOULONKI »
par Dominika et Nadiejda Tchekoun
Deux femmes improvisent à tour de rôle sur un thème qui est typique de la région.

19. « RITOURNELLE POUR TELENKA »
Ensemble folklorique du village de Teresva, district de Rakhiv (région de Transcarpatie)
Soliste et direction : Anton Houzak (telenka)
La telenka est une flûte utilisée par les bergers houtsoul. Dans cette ritournelle, l'interprète exécute un bourdon vocal tout en soufflant dans la telenka. Cela se pratique également avec la floyara, une flûte à bout ouvert à six trous, qui produit une gamme diatonique.

20. « LE SAULE AU FEUILLAGE TOUFFU »
Ensemble folklorique du village de Polesya, district de Sosnytsa (région de Tchernigov)
Chanson lyrique polyphonique, avec une voix aiguë évoluant librement en contrepoint.

21. « JE PARS POUR LA MONTAGNE »
Village d’Ivankivtsi, district de Starosiniavski (région de Khmelnitski)
A cappella. Soliste ; Ivan Kovaltchouk
Ce solo pour voix d'homme est interprété dans le style déclamatoire caractéristique de l'interprétation des ballades en Ukraine.

22. « LA MONTAGNE DERRIÈRE LA MONTAGNE »
Chorale du village de Kovalikha, district de Smita (région de Tcherkassy). A cappella.
Chanson à thème familial, c'est la complainte d'une épouse vouée au malheur dans la famille de son mari. Cette chanson à deux voix est particulièrement représentative d'un type répandu de chant lyrique sur la vie quotidienne à l'époque moderne.

23. « LES FRIPONS »
Ensemble instrumental du village de Jerdino, district de Tchemerovtsy (région de Khmelnitski)
Violon, violoncelle, percussion, instruments à vent
Danse populaire de l'Ukraine orientale. L'ensemble instrumental est une variante de la troïsta mouzyka.

24. « BONSOIR, PETITE MÈRE »
Village d’Ivan, district de Mour-Kourilivski région de Vinnitsa
A cappella. Soliste : Anna Movtchan
Exemple typique de chant nuptial en solo qui se situe en dehors du répertoire rituel du mariage. Style individuel d'interprétation féminine très personnel, lourdement orné de fioritures mélismatiques.

25. « OH, HIBOU, NE VIENS PAS ANNONCER D'AUTRES MALHEURS »
Vasil Netchepa : chant et vielle
C'est un vieux chant cosaque où le hibou apporte la nouvelle de la mort d'un Cosaque sur le champ de bataille à sa veuve et à son fils. Le chanteur s'accompagne à la vielle.

26. « MAMAN, C'EST L'AUBE »
Ensemble folklorique du village de Bohouslavka, district de Kharkov A cappella
Complainte d'une jeune femme. Malgré la tristesse de ses paroles, elle se chante sur une mélodie plutôt gaie attestant son origine cosaque. Elle est typique du style de chant ouvert de la région des steppes de l'Ukraine.

27. « LE SÉDUCTEUR »
Ensemble instrumental du village de Pliski, du district de Pogrebichtche (région de Vinnitsa)
Vladimir Tratchouk : bayan (accordéon à boutons); Victor Pantchouk : accordéon; Vladimir Jerebets : tambour de basque et bouteilles; Valentina Tarassova : planche striée
Version instrumentale d'une chanson sur un personnage de séducteur. Elle fait partie d'un groupe de danses cosaques et est interprétée par une troïsta mouzyka.

28. « OH. MON BIEN-AIMÉ AUX CHEVEUX BOUCLÉS, NE ME QUITTE PAS »
Village de Kroupovoe (région de Rovno) Chant: Ouliana Kot
Solo féminin de caractère lyrique.

29. « SUR LE VASTE DANUBE »
Ensemble folklorique du village d'Ostriv, district de Boug (région de Lvov) Direction : Olga Baraban
Chant et danse avec accompagnement par un ensemble instrumental de plein air, typique de l'atmosphère villageoise qu'on trouve encore en Ukraine de nos jours. Cette œuvre se caractérise par un rythme de polka, avec une mesure supplémentaire qui brise le rythme régulier habituel de cette danse.

30. « HOUTSOULKA »
Région d'Ivano-Frankovsk
Roman, Ivan et Vasily Vatamaniouk : violon, cymbalum et tambour grave (troïsta mouzyka)
Danse populaire de la région des Carpates. Noter la technique d'interprétation de l'ensemble, ainsi que la composition rhapsodique développée au moyen de variations, qui est typique du pays houtsoul.

31. « LE SORBIER »
Trio vocal du village de Louguiny (région de Jitomir). A cappella
par Rosa Jouk, Lioudmilla Tchijouk, Maria Dorodko.
Évoquant le sort d'une femme, ce chant lyrique est empreint d'une tristesse sereine. Cette version «de chambre» d'un chant à trois voix est plus intime que les exécutions qui ont lieu en plein air. Elle reste néanmoins caractéristique de la chanson populaire traditionnelle ukrainienne.

32. « GOPAK »
Région de Soumy
A. Kozitski: violon; M. Bougrim : violon; I. Tchikhar : violoncelle ; G. Pekar : tambour de basque
Danse cosaque traditionnelle de l'Ukraine orientale, exécutée par les hommes. Ici le «trio» traditionnel est en fait un ensemble composé de deux violons, dont l'un joue la mélodie et l'autre un bourdon continu, d'une basolya (sorte de violoncelle rustique) et d'un tambour de basque.

33. « CHANT TCHOUMAK »
Ensemble folklorique du village de Kybytsi du district de Mirgorod (région de Poltava) Les Tchoumaks étaient des commerçants qui, du XVIè au XIXè siècle, transportaient le sel entre la Crimée et l'Ukraine. Ce chant raconte la maladie et la mort d'un Cosaque sur la route. A l'origine, il était exécuté par un soliste homme. Le chant est représentatif du riche répertoire polyphonique du centre de l'Ukraine.

34. ARCAN : « LE LASSO »
Ensemble folklorique de chant et danse Vesselka de la Maison de la culture de Dolyna (région dTvano-Frankovsk) Directeur artistique : Petr Terpeliouk 
Danse houtsoul à 2/4, qui s'accélère vers la fin; Elle est interprétée par un grand ensemble qui porte le nom de velyka mouzyka (grande musique) dans le pays houtsoul. Dans les Carpates, les musiciens populaires sont très talentueux et professionnels; ils font usage d'une technique raffinée en matière de variations, d'instrumentation et de modulation ; ici, ils utilisent notamment dans les variations le violon, le cymbalum et la cornemuse.

T. ANDROUCHUTCUK-ZOLOZOVA et E. MOURZINA

Nous remercions Laurel OSBORN pour son aide à la rédaction du texte. Les enregistrements ont été réalisés par la Maison d’enregistrement du Comité d'État pour la radio et la télévision de la RSS d'Ukraine et le Conservatoire supérieur de Kiev.