Machuel - Kemuri, Parties X à XIV bis


Kemuri, Parties X à XIV bis : 2'18
La voix comme ouverture au Monde

 Le titre Kemuri signifie Fumées en japonais. C'est aussi un titre de recueil de 101 tankas écrit par Takuboku.

— C’est un ensemble de 24 pièces pour choeur d'enfants, voix de ténor soliste, accordéon, gongs chromatiques et tam-tam. Ces pièces s'enchaînent les unes aux autres.



— Elles mettent en musique 24 textes de deux auteurs japonais : ISSA et TAKUBOKU

Les auteurs

Issa Kobayashi (Kobayashi Issa), plus connu sous son seul prénom de plume Issa (Issa signifiant « Tasse-de-thé »), est un poète japonais du XIXe siècle (fin de la période Edo). De son vrai nom, Nobuyuki Kobayashi (alias Yatarō comme prénom d'enfance), il est né le 15 juin 1763 dans le village de Kashiwabara dans la province de Shinano et y meurt le 5 janvier 1828. Il est considéré comme l'un des quatre maîtres classiques du haïku japonais (Bashō, Buson, Issa, Shiki).
Auteur d'environ 20 000 haïkus en quasi totalité composés au XIXe siècle, Issa rompt avec les formes de classicisme du XVIIIe de Buson en proposant un type de romantisme qui renouvelle le genre en y infusant l'autoportrait, l'autobiographie, et le sentiment personnel.

Takuboku Ishikawa Ishikawa Takuboku) est le pseudonyme du poète japonais Hajime Ishikawa, né le 20 février 1886 (on trouve parfois 1885) et mort de tuberculose le 13 avril 1912 à l'âge de vingt-six ans. Surnommé « le Rimbaud japonais » et « le poète de la tristesse », il est plus connu sous la signature de son seul prénom, Takuboku.
Ses principales œuvres sont des tankas et un journal intime.


Les textes choisis par Thierry MACHUEL sont des haïkus et des tankas.

Le haïku

Le haïku (俳句, haiku), terme créé par le poète Masaoka Shiki (1867-1902), est une forme poétique très codifiée d'origine japonaise et dont la paternité, dans son esprit actuel, est attribuée au poète Bashō Matsuo (1644-1694). Il s'agit d'un petit poème extrêmement bref visant à dire l'évanescence des choses. Le haïku doit donner une notion de saison. Les haïkus ne sont connus en Occident que depuis le tout début du XXe siècle. Le haïku japonais s'écrit sur une seule colonne sous la forme d'un tercet de 3 vers de 5, 7 et 5 syllabes.
À titre d'exemple, voici l'un des plus célèbres haïkus japonais, écrit par le premier des quatre maîtres classiques, Bashō :
Dans la vieille mare, une grenouille saute, le bruit de l'eau
L'original japonais est :
furuike ya
(fu/ru/i/ke ya) : 5
kawazu tobikomu
(ka/wa/zu to/bi/ko/mu) : 7
mizu no oto(mi/zu no o/to) : 5
(5-7-5, soit 17 mores (= proche de nos syllabes))


Le tanka

Le tanka, du japonais tanka (短歌, tanka, du japonais tanka chant court), est un poème japonais sans rimes, de 31 syllabes sur cinq lignes. Le tanka est une forme de la poésie traditionnelle waka (和歌, waka? ) et est plus vieux que le haïku, dont il peut être considéré comme un ancêtre. Il fleurit pendant la période Heian (794-1192). Le tanka classique est toujours considéré au Japon comme la forme la plus élevée de l'expression littéraire.
Le tanka est un poème construit en deux parties, la seconde venant conforter la première. Un tanka soucieux du respect des règles originelles doit ainsi marquer une légère pause entre les deux et ne traiter que d'un seul sujet à la fois. Il peut questionner mais ne donne aucune réponse. Le tanka est basé sur l'observation, non sur la réflexion. Il doit être un ressenti sincère et vécu, non imaginé. La première partie est traditionnellement un tercet de 17 pieds d'une structure 5-7-5 (devenu plus tard haïku) appelé kami-no-ku (上の句), et la deuxième un distique de 14 pieds de structure 7-7 appelé shimo-no-ku (下の句).


Voici ce que dit le compositeur sur le choix des textes :
Cette oeuvre "comprend d’abord une suite de haïkus, choisis afin que le chœur d’enfants prenne le rôle du chœur antique, qui commente, explique, « plante le décor » en quelque sorte. En effet, les haïkus ont ceci de remarquable qu’ils peignent une scène, un tableau en peu de mots, qu’ils sont une sorte de photographie littéraire. Stimuler l’imagination sans l’image, avec les mots et les sons, voilà qui est particulièrement adapté au projet choral. Enfin, j’ai aussi sélectionné ces textes en fonction de leur adéquation à la double temporalité des saisons et des heures : je souhaitais évoquer d’une part, l’arc de la journée depuis l’aube jusqu’au lendemain, et d’autre part la succession des saisons depuis le printemps jusqu’au dégel. Cela m’a sans doute forcé à laisser de côté quelques uns parmi les plus remarquables haïkus d’Issa, mais au final, la narration issue de ce collectage est cohérente et constitue l’écrin dans lequel peut se déposer l’histoire des derniers instants de Takuboku.
Les tankas, quant à eux, sont chantés par le ténor solo à l’exception d’un seul texte, que l’auteur semble avoir écrit en se parlant à lui-même, face à son miroir. C’est alors une jeune fille du chœur qui chante ce court poème.
La structure littéraire est donc la suivante : 24 poèmes en tout, symbolisant les heures du dernier jour ; 14 haïkus, groupés en 12 + 2, les saisons suivies de leur recommencement ; 10 tankas, exprimant le cheminement intérieur du poète ainsi que son dernier voyage. C'est Fusako Kondo Margoni qui m'a aidé dans le patient travail de décryptage des textes en japonais".

— Les haïkus sont chantés par le chœur d’enfants alors que tankas sont chantés par les solistes (le ténor et un enfant soprano solo). Ils représentent la voix du poète TAKUBOKU.

— Les haïkus ont été écrits par ISSA et les tankas sont de TAKUBOKUCe dernier y évoque les derniers instants de sa vieD’une façon générale, tous les textes de ce recueil évoquent la fuite du temps : du Printemps à l’automne et du matin à la fin d’après-midi.


La musique par rapport aux textes :

Voici ce qu’en dit le compositeur :
« Au plan musical, je me suis tout d’abord concentré sur les interventions du chœur afin de structurer la pièce. Une série de douze sons traverse l’année, à raison d’une note par saison, avec à la fin une reprise de la série dans l’ordre inversé. Chaque intervention du chœur correspond à un découpage du poème syllabe après syllabe, chantées selon un processus descendant de l’aigu au grave des voix d’enfants avec des divisi qui reproduisent autant que possible les unités sémantiques des idéogrammes et des caractères, ce qui a pour résultat d’exprimer de manière sonore le sens de lecture et la graphie du texte d’origine, colonne simple se lisant de haut en bas. Chaque haïku est traité en quatre étapes : un unisson d’abord, qui se déploie ensuite en éventail jusqu’à former un cluster complexe, puis une tenue de ce cluster animée par des jeux vocaux toujours différents, enfin une remontée plus ou moins rapide, avec de discrets glissandi des voix, vers un nouvel unisson. L’accordéon quant à lui suit toujours le chemin inverse, unisson durant les cluster des voix, cluster durant leur unisson, etc., ce qui forge une plastique sonore très dense.
Ce parcours des voix depuis l’unisson jusqu’à l’accord complexe est aussi le seul moyen d’atteindre des harmonies atonales avec des chanteurs non professionnels : attaquer ces grappes de sons est absolument impossible, surtout pour les voix intermédiaires. .../...
La série de 12 sons donne la première note de chacun des haïkus, assignant à chaque nouveau départ une tessiture différente. Les pièces néanmoins n’alternent pas selon un protocole immuable. J’ai choisi de laisser passer au début sept haïkus à la suite afin d’évoquer d’entrée de jeu le passage du temps – de fait on avance très vite du printemps à l’automne et du matin à la fin de l’après-midi – mais l’intervention soudaine du ténor va perturber ce rythme. On arrive alors au huitième haïku, avec la chute des pétales de fleur, image de la fuite du temps et de notre mort future évoquée sans pathos, comme une chose inscrite dans la nature. Je reprendrai plus loin ce poème, dans le passage en miroir entre le poète et sa jeune femme, puis à la fin au moment où le navire blanc s’avance dans la baie, texte que j’ai perçu comme pouvant exprimer l’instant de la mort. Les alternances de chœur et de solistes sont moins prévisibles par la suite.
Quatre motifs musicaux s’entrecroisent dans Kemuri : motif du voyage (parties 8, 16, 17, 20) de la nostalgie (parties 9, 13 et 14, 18), de l’épouse (thème en miroir des parties 13 et 14) et de la mort (17, 22). Ces motifs peuvent apparaître seuls ou combinés, in extenso ou à peine évoqués. »


Structure générale de KEMURI :
(tableau repris sur le site du lycée d’ORSAY, auteur Thibaut CAPELLE)
En cliquant sur les flèches, on peut écouter l’intégralité du recueil.


En prenant chaque note de départ des haïkus, on arrive à la série de 12 sons suivante :

Ainsi, on a la totalité de la gamme chromatique.

— Le chœur d’enfants démarre la plupart du temps à partir d’un unisson qui se déploie en éventail jusqu’au cluster (= agrégat de sons) pour revenir à l’unisson.

Selon Thierry MACHUEL :
« Ce parcours des voix depuis l’unisson jusqu’à l’accord complexe est aussi le seul moyen d’atteindre des harmonies atonales avec des chanteurs non professionnels : attaquer ces grappes de sons est absolument impossible, surtout pour les voix intermédiaires. Dans ce contexte de voix maîtrisiennes, d’enfants de très bon niveau musical, pouvoir aborder de tels langages est important. Ainsi l’ouverture de l’accord, qui s’enrichit note après note, ensuite est tenu, permet aux chanteurs de contrôler leur voix au sein de la polyphonie, puis dans la durée de la tenue d’entendre le cluster et de se familiariser avec lui. Les jeux vocaux sur ces moments de durée harmonique travaillent sur cette matière sonore sans heurts. Pour approfondir encore en ce sens, j’ai varié la texture des clusters par le changement d’ambitus, c’est à dire en jouant sur l’écart entre la note la plus aiguë et la note la plus grave : l’accord peut se déployer sur une seconde autant qu’une neuvième, voire plus exceptionnellement comme pour l’accord final, qui prend ainsi une figure majestueuse par son ampleur. La variation des ambitus est progressive globalement, de la quinte à la neuvième dans les 7 haïkus du début, puis en resserrement constant de la septième à la seconde pour le passage de l’automne à l’hiver, pour finir sur l’ouverture maximale de dixième dans le dernier poème (matin d’un nouveau printemps). »

Les références au Japon :

— les textes (haïku et tanka)

— l’instrumentation :
>> utilisation de l’accordéon qui fait penser au shô japonais

Le Shō

Le shō (笙) est un orgue à bouche japonais à rapprocher du sheng chinois et du khên laotien et thaïlandais. Il accompagne la musique gagaku.
C'est un instrument à vent qui fonctionne sur le principe de l'anche libre, celle-ci étant très fine donc très sensible. Les tuyaux qui le composent sont perpendiculaires à l'embouchure.

>> utilisation de gongs chromatiques

A ce propos, Thierry MACHUEL raconte une anecdote amusante : « En dernier lieu, les gongs chromatiques sont ici comme une couleur forte, tant leur usage est rare, réservé à l’orchestre en raison de leur encombrement. Il s’agit de gongs européens Paiste (et non Thaïlandais) dont le temps de résonance est particulièrement long. Leur accord a donné lieu à une séance mémorable avec les enfants, car le seul moyen de varier la hauteur sans abimer le métal est de coller un chewing gum au centre du gong ... la couleur magnifique de ces instruments se marie extrêmement bien avec l’accordéon, qui semble souvent émaner de leurs résonances. »



>> utilisation d’un tam-tam
Un tam-tam est un gros gong mais à la différence de ce dernier, il n’a pas de protubérance centrale.

— L’écriture verticale du chœur comme on écrit un haïku au Japon :


Exemple = 1ère pièce
du soprano 1 à l’alto 2, les voix émettent des sons en commençant par l’aigu pour aller progressivement vers le grave.

— Des mélodies utilisant des intervalles de quartes ou de quintes évoquant le pentatonisme
Exemple = 14ème pièce (voix de soprano solo) :

— L’utilisation du registre de falsetto pour le ténor.
C’est aussi une référence au théâtre japonais. Dans le Kabuki ou le ̈Nô, deux genres de théâtre japonais, les hommes utilisent souvent leur registre de falsetto pour imiter les voix de femmes. En effet, ces dernières ne jouent jamais dans ce théâtre, ce sont uniquement les hommes qui sont acteurs.
Exemple = 13ème pièce, voix de ténor :





Analyse des extraits au programme : Parties X à XIV bis : 2'18 :

— Cet extrait se trouve au milieu du recueil. Ce sont 6 pièces qui s’enchaînent faisant alterner des passages avec chœur d’enfants seuls, ténor ou soprano enfant seuls et mélange chœur + solistes.


Textes et leur traduction :


C’est une succession de :

- 1 haïku
- 1 tanka
- 1 haïku
- 2 tankas.


Ils évoquent l’automne et la mort. 



Effectif :
Chœur d’enfants divisé en :

- 2 pupitres de sopranos (S1 / S2)
- 4 pupitres de mezzo-sopranos (MS1 / MS2 / MS3 / MS4 )
2 pupitres d’altos (A1/ A2)


- Ténor soliste
- Soprano enfant soliste
- Accordéon
- Gongs chromatiques
- Tam-tam





n°X et XI 

Ces deux pièces fonctionnent ensemble.


° n°X = haïku chanté par le chœur d’enfants, il est très court : 5 mesures
- La voix de ténor entre à l’extrême fin (mesure 5) = tuilage avec la pièce suivante

- Les enfants sont accompagnés par l’accordéon très en douceur ( = comme un shô japonais) sur une sorte d’accord de fa m avec un sol ajouté (= 4 notes des 8 sons qui seront chantés par les enfants).
- Le chœur (= les 6 pupitres) démarre sur un unisson = note sol puis chacune des voix va ajouter un son nouveau en descendant tandis que la voix précédente tient son dernier son. Ainsi à la fin on obtient la superposition de ces 8 sons.

C’est écrit à 6/8 avec un rythme précis mais on a l’impression que chacune des voix va à son rythme. Cela créée une sorte de halo sonore, le temps est comme suspendu.

T. MACHUEL écrit à ce propos : La partie X débute par « un unisson [qui] se déploie en descendant, recouvrant ainsi l’ensemble de la tessiture, dans la verticalité de la partition, dans le sens d’écriture du bref poème japonais ».


° n°XI (tuilage avec la X) = Tanka chanté par le ténor avec accompagnement du chœur d’enfants sur "o" d’abord, puis sur "a".
- le chœur d’enfants reprend le même principe que dans le n° X mais dans le sens inverse. Chaque voix commence sur sa note d’arrivée (du n° X) et remonte progressivement jusqu’au mi bécarre chanté à l’unisson par les sopranos et les mezzo-sopranos

- l’accordéon n’accompagne que sur les 3 premières mesures et les 3 dernières mesures. Il procède de la même manière que le chœur mais de façon inverse. Mesures 1 à 3, les sons disparaissent peu à peu :


Puis sur les 3 mesures finales il y a de plus en plus de sons avec un crescendo :


- la partie de ténor est seule à chanter des paroles, ce sont celle d’un tanka :



Les deux premiers vers sont chantés et le dernier parlé. Cette partie de ténor est écrite :
* dans un ambitus relativement large (du do au fa aigu = 11ème)
* avec de nombreux intervalles de 4tes et de 5tes, référence au pentatonisme 
* sur une mélodie ascendante puis descendante 

On note des exemples de figuralismes :
* sur la syllabe « on... » début du mot « ongaku » (= "musique" en japonais) = point culminant de la mélodie (= fa aigu).
* sur le vers « imawa Tawau » = « aujourd’hui, elle ne chante plus » :
    ° le ténor doit parler d’une voix « forte et désespérée »
    ° il y a de fortes dissonances entre le chœur d’enfant et les notes de l’accordéon
    ° l’accordéon et le chœur d’enfants sont dans leur tessiture aiguë
    ° entrée du tam-tam = son lugubre. 

Comme dans la plupart des pièces de MACHUEL, on navigue ici entre la tonalité et la modalité. On est en fa mineur mais avec un mib . Donc = mode de la sur fa.
Un la bécarre, note étrangère à l’harmonie arrive à la fin du n° XI, il annonce le mode qui sera utilisé dans le n° suivant (= 2nd mode de MESSIAEN 1/2 ton / 1 ton). Cette note arrive sur le mot kakariki (= oiseau japonais) (// Messiaen ?)




n°XII

Ce passage ressemble beaucoup au n°X, comme ce dernier :

- il est très court (6 mesures)

- il est écrit pour le chœur d’enfants + l’accordéon - les enfants chantent un haïku :

- il démarre sur un mi aigu (la dernière note de la pièce précédente) et descend progressivement jusqu’au fa #, chaque voix tenant sa dernière note.
= halo sonore, temps suspendu
A la différence du n°X, ici, nous ne sommes pas en fa mineur mais sur le 2ème mode de MESSIAEN (alternance de 1/2 ton et de 1 ton).

L’accordéon joue ces 8 sons ensemble au début puis ils disparaissent peu à peu pour finir sur un seul fa b (mi)
- Le chœur termine sur un glissando
- Ce n°XII sonne beaucoup plus agressif que le n°X, c’est :
* plus dissonant
* la tessiture générale est plus aiguë
* cela part de la nuance forte
* on part du mi aigu pour descendre au fab
Cela va avec le texte qui évoque la dure condition de l’homme qui est voué à mourir ( « pas chose facile » / « homme ici bas » = descente + glissando)




n°XIII

Il s’enchaîne en fondu (glissando) avec le XII.

Il est écrit pour l’ensemble de l’effectif (ténor + chœur + accordéon + tam-tam).

- le ténor chante un tanka évoquant la tristesse après la mort de l’épouse aimée :

- le chœur accompagne très en douceur (pp). Chaque pupitre répétant pendant les 6 mesures 2 notes en glissando sur la lettre n. Cela créé un tapis sonore très léger et mouvant.


- l’accordéon accompagne aussi très en douceur (lointain) et sur une mélodie très aiguë (comme pour faire entendre la voix de la femme provenant de l’Au-delà)

- le tam-tam quant à lui marque la pulsation (mesure à 4/4) comme un battement de cœur lointain (« ma poitrine s’allègerait » )

- La partie de ténor est chantée en falsetto (comme certains personnages du théâtre Nô et évoquant la voix de sa femme). On remarque les nombreuses appoggiatures, le rythme qui suit parfaitement le texte et les nombreux intervalles de 4tes et de 5tes évoquant le pentatonisme.



- Pendant ces 6 mesures, on reste dans le 2ème mode de MESSIAEN comme pour le n°XII.




n°XIV

- écrit pour une soprano solo (jeune fille du chœur d’enfant)

- la mélodie ressemble à celle chantée par le ténor dans le n°XIII (appogiatures, rythme fluide suivant le rythme du texte, 4tes et 5tes fréquentes...). C’est comme une réponse au XIII.

- la soprano chante un tanka :



- cette pièce doit sonner « irréel » comme c’est indiqué sur la partition

C’est pourquoi T. MACHUEL a préféré choisir une voix de soprano, à la place du ténor car selon le compositeur « l’auteur semble [l’]avoir écrit en se parlant à lui- même, face à son miroir ». Il évoque la fin de vie du poète. La voix de soprano enfant, c'est comme un voix d'ange.

- les gongs accompagnent avec une cellule cyclique se décalant par rapport à la mesure. Cet accompagnement sonne très asiatique (// le gamelan). Ce n’est pas pentatonique car il y a 6 notes, mais cela y fait penser :


A partir de la mesure 5, des silences sont intégrés progressivement à la cellule rythmique :

l’accordéon accompagne en trémolo sur un accord dissonant dans l’aigu pour accentuer cette atmosphère irréelle.

- Cette pièce utilise toujours le 2ème mode de MESSIAEN mais amputé de 2 notes (le mib et le réb) :





n°XIV bis (tuilage avec la XIV)
Cette pièce est un mélange des textes du XIII et du XIV avec la 1ère phrase du X.
- effectif au complet : chœur / ténor / gongs et accordéon
- chœur : les sopranos reprennent la mélodie de la soprano solo du n°XIV

Les mezzo-sopranos et les altos accompagnent avec un contrechant en 4tes parallèles et ostinato rythmique sur le 1er vers de la pièce X. « tada tanome » = sois rassuré :



- le ténor chante le solo de la pièce XIII
- les gongs reprennent le motif cyclique de la pièce XIV mais en diminution rythmique (= 2 fois plus vite) :

- l’accordéon joue une mélodie en tierce sur un accord pédale de fa# majeur. Il énonce ainsi toutes les notes du 2ème mode de MESSIAEN dans sa totalité.