Janequin - Il estoit une fillette



« Il estoit une fillette » : c’est une chanson à 4 voix qui a été publiée dans le 8ème livre d’Attaingnant en 1540 (c’est encore un de ces volumes consacré entièrement à Janequin). Cette chanson est devenue très populaire et elle a été reprise par de nombreux éditeurs, transcrite au luth, à la guitare, pour voix et luth… Elle a même servi de timbre à un Noël (autrement dit on a changé le texte et on a gardé la musique car elle était très populaire : on a mis des parole de Noël [= travestissement : chose qui se fait assez facilement lorsque la mélodie a imprégné tous les esprits et que tout le monde la connaît]). En fait, cette chanson est une gauloiserie narrative (qui raconte l’initiation amoureuse, l’initiation sexuelle d’une fillette) et que Janequin traite en contrepoint note contre note dans un style très animé et une déclamation syllabique relativement rapide et dans un style rythmique qui évoque aussi la danse (tout doucement on commence à percevoir ces grands modèles de danses qui vont constituer bientôt les couples de danses pavane-gaillarde… ; ici c’est un rythme de pavane ou peut-être de branle). Cette chanson comporte 4 sections répétées c’est à dire AABBCCDD puis reprise de DD. Chaque section comporte 2 phrases aux carrures très régulières de 8 tactus (tout cela évidemment dans la perspective chorégraphique car c’est une chanson qui peut être dansée). Malgré cela Janequin réussit à dramatiser le récit dans la 3ème section où il accélère le débit.

Il estoit une fillette
Qui vouloit scavoir le jeu d'amours,
Ung jour qu'elle estoit seullette
Je luy en aprins deux ou trois tours,
Apres avoir senty le goust
Elle me dit en soubzriant
"Le premier coup me semble lour
Mais la fin me semble friant"
Je luy dis "vous me tentez"
El me dit "recommencez"
Je l'empoingne
Je la fringue fort.
Elle crie "necessez"
Je luy dis "vous me gastez
Laissez moy, petite garse,
vous avez grant tort.
Mais quant ce vint a sentir le doulx point
Vous l'es_ussiez veu mouvoir si doulcement
Que son las cueur luy Tremble fort et poingt
Mais, Dieu mercy, c'estoit ung doulx tourment,