Amplification de la guitare

1. Analyse physique du signal
Toute note est un signal sinusoïdal possédant une multitude d'harmoniques caractérisant le timbre propre à chaque instrument. A l'attaque d'un coup de médiator, la guitare produit un signal sinusoïdal plus ou moins intense (ou fort en volume si vous préférez). Celui-ci reste tout de même très faible pour attaquer un amplificateur de puissance dans les meilleures conditions. Ce signal doit passer par un étage de pré amplification (un ampli guitare est toujours muni d'un préampli, et d'un ampli de puissance).
Cet étage dispose d'une certaine caractéristique : si on lui en demande trop (en poussant le signal d'entrée ou le GAIN) celui-ci ne pourra pas en donner plus que ce pour quoi il a été conçu. Aussi il tentera d'amplifier la sinusoïde sans y parvenir et provoquera un écrêtage, tronquant les extrémités de la courbe du signal d'origine. Cet écrêtage se traduit auditivement par ce qui est appelé la "distorsion".

Cette distorsion n'existe qu'en théorie. En pratique, le signal sinusoïdal est transformé en signal crénelé, propre aux composants transistors ou lampes. De même, le préampli dispose d'un potentiomètre de réglage d'un seuil, le réglage du gain (le potentiomètre peut ne pas exister sur les amplis bas de gamme, et le seuil est alors fixé par le constructeur...). Ce seuil, c'est la ligne représentant l'intensité à partir de laquelle le signal s'écrête, un "seuil de saturation" du signal en quelque sorte.
Petite précision sur les termes : en électronique, l'écrêtage est également appelé "distorsion". En revanche, le mot "saturation" traduit un autre phénomène. C'est plutôt la sensation produite par un son très distordu qui conduira à dire qu'un son est "saturé".
Ce constat purement théorique mis en pratique ne donne qu'un résultat médiocre et peu musical. Effectivement l'écrêtage est trop brutal pour nos petites oreilles ! Dommage puisque qu'électroniquement parlant, la chose était extrêmement simple à réaliser depuis l'avènement du transistor. Mais le signal, une fois modélisé se retrouve dans l'oscilloscope sous la forme de créneaux. On retrouve le seuil d'écrêtage en "haut" des créneaux, et une forme de signal crénelé électroniquement parfait.
Mais voilà où se situe la supériorité des lampes : identiques, en fonctionnement, aux transistors, elles possèdent un taux de compression naturel, dû autant à leur conception moins robuste et "imparfaite", ainsi qu'à leur vieillissement (ou usure). C'est donc par le biais d'un composant électronique "moins parfait" et techniquement plus ancien que le transistor, que le son du rock a évolué.
Ainsi la distorsion par les lampes se conçoit par analogie, grâce à un composant adoucissant les "angles" du signal crénelé propre à un signal traité électroniquement. Néanmoins, une oreille attentive et entraînée (un bon guitariste) fait la différence entre un ampli à lampes et un ampli à transistors, trouvant le son des lampes beaucoup plus "chaud", beaucoup plus "vivant" et plus "naturel". Ces termes sont totalement dénués de sens dans notre analyse électronique du signal distordu, ils ne font qu'illustrer le fait qu'une différence existe...

Le réglage de toute distorsion dispose d'un seul et unique paramètre : le gain dénommé taux de distorsion. Plus on tourne ce potentiomètre (sur l'ampli, le préampli ou la pédale) et plus la distorsion (l'écrêtage) est importante. Reste encore à modeler votre son en triturant les réglages d'égalisation ou de contour (réglage du spectre de fréquence médium).
2. Le composantes d'un son distordu
Le son de Hendrix tenait à la fois de son jeu, de son matériel, sa Fuzz Face Abiter, ses amplis Sun ou Marshall branchés sur des HP Fender, sa Wha-wha, etc … Tous ces éléments rentrent en jeu dans la composition des sons distordus qui l'ont rendu célèbre. Page joue encore des Vox AC 30 et a toujours un son terrible alors que Slash utilise des murs entiers de Marshall pour obtenir un son formidable. Mais ce son, qui semble géant n'est, sans aucune mesure, comparable à celui de Brian May, puisqu'il utilise essentiellement de petits amplis et obtient un son colossal ! Le tout pour illustrer le fait qu'un son distordu dépend complètement des maillons composant la chaîne sonore, à savoir les micros, les câbles, les pédales d'effets, les préamplis, les amplis de puissance et les haut-parleurs.
Avant d'aller plus loin, tentons de donner une définition de la distorsion, tout au moins pour vous faire part de ma vision des choses. On peut la diviser en trois catégories : cleancrunch et overdrive, comme Mike Soldano : " Je considère le crunch et l'overdrive comme deux sons bien distincts. L'overdrive contient plus de compression, de distorsion et de sustain que le crunch. Un bon son crunch sera donc plus ouvert."
Comment fabriquer une distorsion ? "Un peu comme une formule 1 et un chef italien !", dit Randall Smith de Mesa/Boogie. "Vous pouvez avoir le meilleur moteur du monde, mais sans la bonne combinaison du châssis, de la boite de vitesses, des pneus et de I'équilibre aérodynamique, tout ça peut n'avoir rien d'une voiture. Quant aux pâtes, il peut falloir un peu plus d'ail et un peu moins de sel pour atteindre la perfection. Pour le son, c'est la même chose : c'est la combinaison des ingrédients qui fait que la distorsion fonctionne, et non pas un seul d'entre eux."
Pour avoir une idée du sujet, il faut connaître les maillons de la chaîne : micros, pédales d'effets, préamplis, amplis de puissance, HP, tous jouent un rôle important dans la création de la distorsion.


En pratique
L'oreille distingue plusieurs types de distorsions, sans que l'on puisse réellement définir de limite entre chacun d'entre eux. Ces distinctions sont aussi liées aux différences que les musiciens trouvent entre les styles musicaux.
  • Clean : le son n'est pas coloré par une action sur le gain.
  • Crunch : très légère distorsion. Si le coup de médiator est léger, le son est clair. Si au contraire il est plus marqué, le son est subtilement teinté de distorsion. Appliqué au Blues et Soft-Rock.
  • Overdrive : distorsion douce caractéristique des canaux saturés des amplis britanniques de type Marshall, non poussés en volume. Appliquée au Blues, et au Rock.
  • Distorsion : distorsion moyenne, plus riche en harmoniques. Assez polyvalente, elle s'applique au Blues-Rock, Rock, Hard-Rock FM.
  • Fuzz : distorsion assez forte et sale. Rock, Grunge.
  • Saturation : distorsion agressive, jouée généralement à fort volume. Assez précise, elle s'applique au Grunge, Hard-Rock, Metal, Thrash...
Encore une fois, il n'existe pas de règles établies pour définir les types de distorsion. Ces classements sont autant dus aux références des constructeurs qu'à l'évolution des effets et des sons guitares (un son ultra-saturé dans les 60's peut paraître bien faible de nos jours).